La bonne foi de certains colporteurs de la rumeur

 

            L’un des enfants retrouvés morts parmi les passagers du car d'Alès était un très proche cousin d'une personne habitant dans les environs de Nîmes. Dans l'affolement, un bruit court à  Alès selon lequel de nombreux enfants ont péri. Ce que la parente reprend à son compte en toute bonne foi. Comment ne pas la croire ? Quelques jours après, la personne en question dément cette information. Mais la rumeur a eu le temps de se diffuser.

 

            Autre anecdote. Un garçon de 16 ans, considéré par son entourage comme honnête et très équilibré, se trouve dans les rues de Nîmes au lendemain des inondations. Il en revient ébranlé. Il raconte à ses proches que, voyant un attroupement, il s'est approché et a vu une pelle mécanique extraire un cadavre de la boue, plus précisément le ca­davre d'un jeune homme. Son implication est totale et son angoisse profonde. Apparemment, il ne raconte pas cela pour se donner de l'importance.

            Plusieurs semaines après, un membre de sa famille, conscient des mécanismes de propagation de la rumeur, l’entreprend et finit par lui faire modifier son interprétation. Il rapporte les choses ainsi : "Certes, il a vu le cadavre, mais de loin... Il l'a vu, mais de trop loin pour pouvoir dire si c'est une homme ou une femme, un jeune ou un vieux... Il a surtout vu une pelle mécanique remonter quelque chose... En fait, il n'a pas vraiment vu le cadavre, mais il ne peut y avoir de doute à ce sujet, les nombreuses personnes présentes ayant dit que c'était le cadavre d'un jeune homme." 

            Un an après le garçon en question refuse d'être questionné sur le sujet. Il dit qu'il n'avait alors que seize ans, que c'est du passé...

Source : La Rumeur de Nîmes, sous la direction de René Domergue, éd. Edisud,  p.33-34

 

 

 

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